EXPOSE DES MOTIFS

La réglementation relative à l’Aviation civile est déterminée par la loi n° 87.02 du 21 janvier 1987 portant code de l’Aviation civile. Si ce code comporte des dispositions assez pertinentes, il se trouve cependant qu’aujourd’hui, il paraît très restrictif en ce qu’il ne prend pas en compte toutes les préoccupations du secteur de l’Aviation civile. En effet, le contexte international et sous régional a beaucoup évolué et le Sénégal a contracté beaucoup d’engagements dans le cadre de la coopération multilatérale et bilatérale qu’il est indispensable d’intégrer dans la législation nationale. Ainsi :
* le besoin de sécurité du transport aérien international, dans un contexte assez particulier, s’est accru et a été réaffirmé dans les instances internationales notamment dans le cadre de l’OACI ;
* une nouvelle politique aéronautique africaine a été dégagée à travers la Déclaration de Yamoussoukro de 1988 laquelle a été revue et mise en œuvre en 1999 ;
* une Convention relative à l’unification de certaines règles concernant le transport aérien international a été adoptée à Montréal et signée par le Sénégal le 28 Mai 1999 (mais non encore ratifiée) ;
* l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) créée par le Traité de Port Louis le 17 Octobre 1993 a adopté plusieurs Actes Uniformes ;
* de nouvelles orientations ont été définies en 2002 dans le cadre de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (créée à Dakar le 11 janvier 1994) en vue d’un programme commun de transport aérien avec pour principal objet de lutter contre la marginalisation et de contribuer à la création d’un espace aérien sûr, ordonné et efficace ; ce qui s’est traduit par l’adoption d’un certain nombre de Règlements et Directives.
Cette évolution depuis 1987 exige une refonte du Code de l’Aviation civile en vue de l’adapter aux nouvelles exigences notamment de l’OACI, de l’UEMOA et de l’OHADA. Tel est l’objet du présent projet de loi comprenant 258 articles qui, tout en apportant des correctifs importants au code introduit de nouvelles règles dont les principales portent sur les points suivants :
1. Au niveau du Livre I
La création d’une structure administrative autonome est une grande innovation qui traduit la préoccupation actuelle des Etats membres de l’UEMOA qui, au titre de l’amélioration des systèmes de transport aérien, ont recommandé l’attribution d’un statut juridique approprié et d’une autonomie financière et de gestion aux structures nationales chargées de l’Aviation civile (ce fut l’objet de la réunion des Ministres chargés des Transports de l’UEMOA à Dakar le 15 Mars 2002).
Cette politique permet, par ailleurs, de renforcer les prérogatives de ces structures en vue d’une meilleure prise en charge du secteur notamment du point de vue de la sécurité de la navigation aérienne. C’est pour cette raison que le Titre I du présent Livre propose la création d’un service administratif de l’Etat chargé de l’Aviation civile doté d’une autonomie financière et de gestion avec des attributions importantes notamment du point de vue technique (Titre 2) de manière à lui permettre d’exercer efficacement les missions qui lui sont confiées. Les textes d’application permettront de préciser davantage le statut de cette structure qui reste sous tutelle du Ministre chargé de l’Aviation civile.
2. Au niveau du Livre II
Ce livre, consacré aux aéronefs, est composé de trois (3) Titres à savoir celui relatif à la propriété, aux garanties et saisies d’aéronefs (Titre 1), celui relatif à la circulation aérienne (Titre 2) et enfin celui ayant trait à la responsabilité résultant de l’exploitation des aéronefs (Titre 3).
A propos de l’immatriculation des aéronefs, le principe selon lequel un aéronef ne peut circuler sans avoir été immatriculé est rappelé (article 22) ; ce qui doit être fait auprès de l’Agence chargée de l’Aviation civile sur un registre spécial (article 23) avec délivrance d’un certificat (article 28) conformément aux normes OACI et UEMOA ; avec cette précision que l’Autorité chargée de l’Aviation civile peut suspendre, retirer ou procéder à la radiation du certificat (article 29).
La possibilité pour cette Agence de saisir tout aéronef sans certificat de navigabilité ou ne se conformant pas aux conditions établies est prévue aux articles 53,77,123. S’agissant des garanties réelles des créanciers ayant l’aéronef pour assiette, elles sont réglementées à travers l’hypothèque (articles 38 à 50) et les privilèges (articles 51 à 54). Quant aux saisies, les nouvelles dispositions se sont inspirées d’instruments internationaux non ratifiés par le Sénégal mais consacrés par le Droit international notamment à propos de la saisie conservatoire (articles 56 à 59) et ont adopté la terminologie juridique utilisée dans l’OHADA relativement à la saisie vente (article 61) terme préféré à celui de saisie exécution. Et dans le même sens, un régime de distribution du prix résultant de la vente de l’aéronef (article 66) a été institué ce qui n’existe pas dans l’actuel code.
En ce qui concerne la circulation des aéronefs, la liberté de circulation (articles 67 à 72) et d’atterrissage (articles 36 à 38) est réaffirmée mais sous le contrôle de l’Autorité chargée de l’Aviation civile sous réserve de certaines interdictions (article 70) ; l’obligation d’utiliser un aérodrome international (douanier) pour les aéronefs effectuant un vol international (article 75) demeure.
Quant à la police de la circulation aérienne, elle a été renforcée pour plus de sécurité (articles 73 à 90) et les redevances de routes maintenues (article 91).
Enfin, la responsabilité civile (article 93 à 99) et pénale (article 100 à 117) résultant de l’exploitation de l’aéronef a été maintenue avec pour la procédure pénale y afférente, la prise en compte des règles pertinentes relatives aux enquêtes sur les accidents et incidents de l’Aviation civile édictées dans le cadre de l’UEMOA (articles 120 à 125).
3. Au niveau du Livre III
Ce livre relatif aux aérodromes traite principalement du régime des aérodromes (Titre 1) avec leur mode de création et de mise en service (chapitre1), leur classification (chapitre 2) et leurs conditions d’exploitation et de gestion (chapitre 3) ; des servitudes aéronautiques et de la protection de l’exploitation (Titre 2).
L’accent est mis sur la possibilité pour un particulier, en plus de l’Etat et des Collectivités locales, de créer un aérodrome ouvert à la circulation aérienne publique après autorisation du Ministre chargé de l’Aviation civile et signature d’une Convention avec ladite structure ; la structure chargée de l’Aviation civile pouvant délivrer, suspendre et retirer les certificats d’aérodrome. Quant aux servitudes aéronautiques permettant de réglementer l’occupation du domaine public aéroportuaire, elles sont régies par les articles 143 à 152 avec des dispositions civiles et pénales de nature à protéger l’exploitation et l’environnement (articles 153 à 163).
4. Au niveau du Livre IV
Ce livre concerne le personnel navigant. Il introduit une nouvelle distinction entre personnel navigant professionnel (articles 180 à 202) et personnel navigant non professionnel (articles 203 et 204). Il fixe le principe de l’exigence des titres aéronautiques aux personnes chargées de la conduite de l’aéronef (articles 164 et 202) avec notamment des licences délivrées par l’Agence chargée de l’Aviation civile pour ceux qui ont satisfait aux exigences relatives au contrôle des connaissances (articles 164 et suivants), à l’aptitude physique (articles 168 et suivants) et leur inscription dans un registre spécial (article 184 et suivants).
Les fonctions, pouvoirs et responsabilités du commandant de bord sont bien déterminés (articles 189 à 192). Des dispositions nouvelles sont instituées à propos des conditions de travail et relatives notamment au contrat de travail du personnel navigant professionnel (articles 194 à 200) et aux maladies professionnelles (articles 201) ; des sanctions pénales prévues contre toute personne usurpant les fonctions de personnel navigant professionnel et toute personne qui en serait complice (article 202).
Enfin, le personnel navigant non professionnel est visé aux articles 203 et 204 ainsi que la formation aéronautique traitant des aéro-clubs (articles 205 à 207) .
5. Au niveau du Livre V
Le Code actuel comporte beaucoup d’incohérences qui ont été corrigées dans ces nouvelles dispositions consacrées aux modes d’exploitation des aéronefs. Pour plus de cohérence, il commence dans le Titre 1 par les entreprises de transport. La liberté d’exercice des entreprises de transport est maintenue avec l’autorisation de l’Autorité chargée de l’Aviation civile (articles 212 et suivants), sous réserve du droit communautaire UEMOA (article 221), l’Autorité pouvant faire appliquer des sanctions pénales aux contrevenants (articles 226 et 227). Quant au Titre 2, il traite des contrats de transport de marchandises (articles 229 à 241) et de passagers (articles 242 à 246) mais aussi des relations entre transporteurs (articles 247 à 249) avec des précisions relatives au fondement de la responsabilité du transporteur (article 232), au dommage pour retard (article 233), au transport successif (articles 240 et 245).

Enfin, l’affrètement et la location d’aéronefs sont mieux réglementés (articles 250 à 257) avec une prise en compte des règles édictées dans le cadre de l’UEMOA (article 251) et de la possibilité pour les parties de nationalités différentes de faire observer la règle prévue par l’article 83 bis de la Convention de Chicago du 7 Décembre 1944.